24 juin 2012

DJ Oil, des Black Notes plein la tête

L'ex membre des Troublemakers Lionel Corsini revient avec un nouvel album toujours empreint d'une soul dense...

En deux disques et une compilation, les Troublemakers avaient réussi à se faire un nom en évoluant pourtant d'un premier album, Doubts & Convictions (2001, Guidance), orienté électronique à un second, Expressway (2004, Blue Note), nettement plus soul.
Cette soul est de nouveau au programme du nouvel album de DJ Oil qui prolonge en solo le projet du groupe de donner de la fraîcheur à des influences 70's. Difficile en effet de ne pas penser au Trouble Man de Marvin Gaye par exemple à l'écoute de ce Black Notes (Discograph)...

Dès le premier titre, la référence aux travaux passés est de rigueur avec la présence de Gift Of Gab, invité marquant du précédent long format, qui répète le mot "black" un peu à la manière de l'excité présent sur All We Love aussi extrait d'Expressway.
Black Notes
, pour titre, blaxploitation, pour référence, black music pour mot d'ordre.


DJ Oil ne répète toutefois pas exactement le modèle d'Expressway qui explorait de multiples directions. Il préfère creuser le sillon d'une musique instrumentale dense et pressée où chaque instrument, chanteur ou rappeur vient raconter une histoire.
Le spoken word de Reggie Gibson, le rap de Gift Of Gab ou la flute de Magic Malik sont ainsi présents en renfort pour écrire un chapitre.

En arrière plan, un groove envahissant et urgent, entêtant et brulant. Une fièvre à la basse structurante, à la batterie fougueuse, qui prend tout son temps pour monter et se développer. Sans passéisme, l'auteur retranscrit la lutte et l'énergie de la blaxploitation.
Il se permet aussi quelques détours, avec notamment ce Mind Your Step avec Sam Karpienia qui s'inspire plus de l'orient que des rues de Harlem. Lionel Corsini laisse aussi transparaître des souvenirs d'Afrique (P.O. Box), son goût pour le jazz et même une teinte house (Buddy), tout en préservant l'atmosphère soul dominante.

Bonus :

- Réécoutez quelques titres des Troublemakers dans la radio de ce blog.

- Le clip du titre Black Notes avec Gift Of Gab :


Dj Oil - "Black Notes (feat.Gift Of Gab)"... par Discograph

5 juin 2012

Versatile, label et état d'esprit musical de Gilb'R

Avoir 15 ans d'ancienneté pour un label est aujourd'hui le signe d'une belle résussite... mais comment fait Gilb'R ?

Monté de Nice à Paris en 1990, c'est en passant par Radio Nova que DJ Gilb'R découvre la house et commence sérieusement à mixer. Après des périodes rap, puis drum'n'bass, il s'est ensuite ouvert plus largement aux musiques électroniques avec le développement de Versatile qui compte dans ses rangs I:Cube, Etienne Jaumet, Nicolas Ker (chanteur de Pony Hoax) ou Zombie Zombie. Un certain éclectisme revendiqué par le créateur de ce label dans ses choix artistiques comme dans ses mixs qui nous parle, entre autre, de sa vision de la scène actuelle.

Quel bilan tires-tu de Versatile après 15 ans d'activité ?

Etre encore là aujourd'hui est une grosse surprise, même si nous avons connu des périodes plus florissantes. Nous avons des projets, de disques à sortir. J'aimerais bien dénicher des artistes plus jeunes, de nouvelles signatures, mais je ne trouve pas de morceaux qui m'éclatent dans ce que j'entends. J'aime les personnalités, distinguer une personne derrière la musique, ce qui est à contre courant de ce qui se fait aujourd'hui. Sous des dehors très ouvert, cette époque reste très fermée.


Faut-il produire pour tourner aujourd'hui ?

Aujourd'hui, un disque est une carte de visite pour tourner, sans, c'est très difficile d'avoir des dates. C'est regrettable car un bon producteur n'est pas forcément un bon DJ et vice-versa. Le public est ouvert, mais les promoteurs sont moins aventureux dans leur choix que par le passé. Maintenant, un club préfère avoir un gros guest payé cher dans le mois et sinon un résident qu'un invité différent chaque semaine.
Du fait que les disques ne se vendent plus, l'industrie a évolué. Je pense qu'à terme, la musique sera gratuite. L'histoire de la musique reproduite sur support est assez courte, en l'espace de 100 ans, on revient  à une situation où les gens sont plus intéressés par le live.


Y a-t-il aussi eu une évolution technique ?

Maintenant, on peut tout faire sur ordinateur, la musique se consomme de manière différente. Les bedrooms DJ, en jouant des mp3 mal compressés ont formaté l'oreille des gens dans un spectre plus réduit qu'avant. Je pense quand même qu'il y a de la richesse dans un vinyle, une chaleur, une rondeur dans le son que l'on ne retrouve pas avec les mp3.
J'espère que dans le futur, les DJ vont se dégager de ce diktat invisible. J'espère plus de fantaisie ou de personnalité pour revenir à quelque chose de plus ludique, de plus humain. Il serait bénéfique de revenir à quelque chose de plus artisanal, que la musique soit moins fonctionnelle. Je pense que ceux qui peuvent être créatif actuellement, sont ceux qui ont une activité à côté. Quand tu n'as pas de pression sur les ventes, tu fais ce que tu veux.

De ce fait, comment gères-tu les artistes du label ?


Les gens qui créent un label aujourd'hui doivent faire plus de management qu'auparavant, quand on pouvait passer par un tourneur sans qu'il ne soit intéressé par la production car les disques se vendaient. Mais maintenant que ce n'est plus le cas, le label qui ne fait que ça ne peut pas vivre. Nous fonctionnons toutefois ainsi chez Versatile car nous sommes une petite structure. L'époque où l'activité d'un label était lucrative est derrière nous.

Où joues-tu maintenant ?


A partir de septembre, nous allons retrouver avec Versatile une résidence au Rex club. C'est le seul club où l'on peut s'autoriser plein de choses, où le sound system est bon, qui a une vraie culture dance music et qui n'a pas ce côté discothèque très français. Actuellement, nous voyons l'émergence de plein de soirées, comme les Concrete ou les Die Nacht dans un esprit rave. C'est le retour d'un truc plus libre et plus convivial qu'en club, avec des DJ pas forcément connus. Il n'y a finalement à Paris pas assez d'endroits de nuit alors qu'à Berlin ça bouge sans arrêt.

Bonus :

- Un mix de Gilb'R réalisé pour les 15 ans de Versatile :



- N'oublions pas que Gilb'R produit également de la musique avec I:Cube sous le nom Chateau Flight et avec Nicolas Ker sous le pseudo Aladdin.