22 avr. 2012

Scratch Bandits Crew, le groupe de DJ en mode long format

Après C2C et avant Pulpalicious, c'est le collectif de DJ lyonnais qui fait son retour discographique avec 31 Novembre (Infrasons)...

Après 7 ans de vie à géométrie variable, Scratch Bandits Crew est devenu un trio en 2009. Finie l'heure des compétitions, vient celle de la composition. Avec En petites coupures en 2010 (lire la chronique), le groupe posait les bases de sa musique. Il revient deux ans plus tard avec un nouvel album qui affine l'ébauche.

Le ton est mélancolique, la larme à l'oeil, le scratch est feutré. Le ton se durcit, le beat éclate avant de reprendre toute sa langueur. Quelques samples de voix hantent ce Heart Beat d'ouverture qui dresse magistralement l'esquisse des qualités du groupe. Justesse, sens de la mesure et de l'ouverture.
Dans une ambiance de musique de film, Supa-Jay, Geoffresh et Syr se faufilent entre influences jazz et volonté de faire bondir le dancefloor avec toujours cette culture hip-hop qui se manifeste en creux dans l'esprit, les rythmiques et la discrète présence des platines. Cette subtile mixture fraye son sillon l'air de rien, entre mélodies brillantes comme sur Light Graffiti part one et poussées plus dynamiques et syncopées, notamment sur Upside Down avec Marine Pelligrini en invitée.


Check It Out offre la synthèse de leur style avec les interventions scratchées de rappeurs à l'invective puissante, les percussions qui s'emballent et ce piano qui offre une ligne directrice cohérente. Un piano qui fait d'ailleurs figure de repère presque tout au long de cet album, apportant calme et rondeur à cet univers foisonnant.
Un équilibre qui se maintient dans la longueur avec l'énergique You Know et l'enchanteresse 2e partie de Light Graffiti qui mêle cet éternel piano tout en volupté alors que la rythmique se contient d'exploser pour laisser l'auditeur coupé dans son envol.

Pour bâtir leurs architectures en spirales, les Scratch Bandits enregistrent des musiciens pour donner ces textures organiques puis passent les sons dans leurs machines, parfois construites par leurs soins pour moduler et rejouer à leur façon. Des subtilités à saisir en concert plus que sur disque...

Bonus :

- Quelques titres de leur album en écoute sur Soundcloud (d'autres morceaux du groupe sont à retrouver dans le player du blog) :



- Découvrez le clip de Heart Beat, extrait de 31 Novembre :


Scratch Bandits Crew - Heart Beat (official video) par scratchbanditscrew

- Retrouvez Scratch Bandits Crew en interview dans l'émission Amplitudes du 30 juin 2012.

17 avr. 2012

Disquaire Day, samedi 21 avril 2012, achetez des disques !

Pour sa 2e édition, l'événement regroupe 176 disquaires en France pour fêter ces vendeurs indépendants...

Le 21 avril 2012 se tiendra le Disquaire Day. Version française du Record Store Day anglais et américain, cette journée est organisée par chez nous depuis 2011 par le Calif (Club action des labels indépendants français). Des gens qui ont l'intelligence de ne pas flinguer à tout va le téléchargement pour expliquer la crise du secteur :
"Cette crise est due, à la fois à une révolution technologique majeure non maîtrisée, le passage à l’ère digitale et au fait que, depuis les années 1980, les acteurs économiques de la filière musicale ont traité le disque comme un bien marchand quelconque soumis aux seules lois du marché", peut-on lire sur le site de l'événement.

Et le meilleur : "Avec le passage du vinyle au CD, on a appliqué au disque le « business model » du produit standardisé, le marketing à outrance, la grande distribution, la concentration et l’uniformisation de la filière. L’industrie du disque a alors négligé l’un des maillons essentiels de sa transmission auprès du public : les disquaires."
Et vlan.
En plus de votre amour du disque, ça fait deux bonnes raisons pour se bouger dans un des 176 disquaires partenaires de la journée.


Une 3e raison ? Vous trouverez en boutique des inédits proposés par les quelque 150 artistes partenaires qui ont imaginé pour l'occasion des 33 et 45 tours uniques. Parmi eux, 2 Many DJ's, Anthony Joseph & The Spasm Band, Camille, Chapelier Fou, Common, DJ Food, J Dilla, Matthew Dear, MC5 & Afrika Bambaataa, Sigur Ros, The Black Keys, etc.

Encore une raison de vous déplacer, des concerts seront organisés dans les boutiques...
Et pour finir la journée en beauté, un concert de clôture est organisé à la Gaîté Lyrique à Paris avec Claire Denamur, Jil Is Lucky, Hushpuppies et Krazy Baldhead

9 avr. 2012

Sorg, guitare, platine et MPC pour instruments

Avec un premier maxi sorti le 15 mars, Sorg dévoile son projet qui mêle beat rap et abstraction électronique...

De la guitare dans une famille de guitaristes, Sorg est passé de la batterie à la basse, puis d'Ableton Live à la combinaison MKII-MPC en 2007 et 2008. L'objectif était au départ de faire des beats pour des MC, mais il s'est vite lancé dans des compositions plus personnelles. Le projet s'est concrétisé après une masterclass de beatmaking avec Miqi O. à Besançon en 2011.

Et voilà donc ce premier maxi - Preface - mêlant samples intelligemment imbriqués, caisse claire qui claque, extraits de films pour l'ambiance et mélodies accrocheuses. Sorg aime multiplier les sources et les collages pour créer la profusion, alternant breaks en apesanteur et relances efficaces. Le tout dans un style abstract hip-hop sobre version plus lumineuse que torturée, et quelques influences rock qui ressortent par moment.


Avec 5 concerts au compteur, notamment lors de dates avec Lilea Narrative [lire l'interview] ou Robert le Magnifique, le projet est encore en phase de rodage... Sorg joue pour l'instant seulement avec son ordi et des contrôleurs sur scène, mais il compte bien intégrer la platine et le scratch.

Bonus :

- Ecoutez le maxi Preface sur le site Bandcamp de Sorg (en vente à 2 euros).

- Le clip du titre Remote :

2 avr. 2012

Only for DJ's, le dossier qui secoue l'univers des clubs

Avec un très intéressant dossier revenant sur 20 ans de culture club, le magazine Only For DJ's dénonce les nombreuses dérives de cet univers...

Rédacteur en chef d'Only For DJ's et auteur du dossier publié en décembre dernier, Ludovic Rambaud a souhaité faire le point sur la situation du clubbing international avec un regard rétrospectif sur les 20 dernières années. Le magazine fêtait justement ses 20 ans en 2011, alors qu'il était en redressement judiciaire, avant finalement de trouver un repreneur pour continuer l'aventure.

Pourquoi avoir publié ce dossier ?

Il m'a été inspiré par une accumulation d'anecdotes de DJ et d'agents qui allaient dans le même sens. Le système a changé et n'a pas évolué pour le mieux. On peut se réjouir que les DJ soient bankables, mais il y aussi des vices dans le système. L'argent est tabou dans ce milieu et personne ne veut en parler.

Comment ces vices sont-ils apparus ?

Le début des années 2000, à la suite de la vague french touch, a constitué un tournant. Il y a alors eu un formatage de la musique électronique, les morceaux longs ont laissé la place à des formats médias de 3'30. La musique de club a de plus en plus été destinée à un public très large. Tous les DJ internationaux sont devenus également producteurs et ont fixé eux-mêmes leur valeur. C'était le début de l'engrenage.
Il y a 20 ans, les DJ n'étaient pas autant mis en avant, même dans la position des cabines DJ dans les clubs. De plus, tout un tas d'acteurs s'est greffé autour des DJ car ils avaient un potentiel économique.


Tu dénonces un certain formatage musical, vient-il des DJ ?


Il y a des plus en plus de DJ sur le marché international, nous sommes passés d'une petite à une grande famille. Et il y a en effet par ailleurs, technologie aidant, un formatage musical par style. Toute la musique est désormais disponible sur Internet, les DJ n'ont plus d'avance et les playlists sont de plus en plus les mêmes. Avant, pour tourner sur le circuit traditionnel, il fallait du talent. Pour avancer, il fallait maîtriser les platines vinyles, une capacité de programmation, de l'énergie. Aujourd'hui c'est l'inverse, les jeunes DJ, grâce aux logiciels, arrivent sur le marché sans savoir mixer.

Quelle conséquence a la montée des cachets sur le clubbing ?

La conséquence directe est que beaucoup de clubs n'ont plus du tout les moyens de se payer ces DJ, même s'ils avaient l'habitude de les faire venir avant. Nous sommes dans la seule logique de l'offre et la demande avec des DJ qui ne réfléchissent qu'en terme purement économique. Ils ne traitent d'ailleurs plus directement avec les clubs, mais passent par des agents. Par exemple, le Suédois DJ Avicii a 23 ans, il a cinq ans de métier, est classé n° 6 du top 100 de DJ Mag, son cachet a augmenté au fil des années et aujourd'hui un club français ne peut plus se le payer.

Quels sont les facteurs de cette évolution ?


Le clubbing s'est internationalisé, il y a désormais des nouvelles destinations qui ont pris le dessus sur la vieille Europe comme Dubaï ou les Etats-Unis, mais aussi d'autres plus improbables comme l'Albanie, la République Tchèque, ou la Croatie. Ce sont des destinations fortes car il y a plus d'argent.
Les Etats-Unis sont devenus l'eldorado des DJ et l'Angleterre, la France ou l'Allemagne sont obligés de s'aligner. Les gros événements clubs français ont de plus en plus de difficultés à boucler leurs budgets. Cette année, David Guetta préfère d'ailleurs tourner dans des salles de concert plutôt que de faire des clubs.


Dans ton dossier, tu ne fais pas que critiquer. Peux-tu détailler les solutions que tu proposes ?

Au niveau du système de rémunération des DJ, il y a une vraie hypocrisie. L'argent est devenu le critère numéro un des DJ, mais dans les interviews, ils affirment tout le contraire, déclarant qu'ils ne sont guidés que par la musique. Si les DJ et les agents mettaient vraiment leur amour de la musique en premier, ils pourraient trouver une nouvelle solution de rémunération. Au lieu d'un versement de la totalité du cachet à l'avance, le DJ devrait estimer la valeur artistique du lieu et demander une partie du cachet avant de jouer, puis être payé en fonction de la soirée et de sa réussite.

Tu souhaites aussi qu'il y ait plus de prises de risques au niveau artistique ?

On retrouve tout le temps les mêmes DJ aux mêmes endroits et beaucoup de jeunes talents ne sont pas mis en avant. On retrouve toujours les mêmes têtes d'affiche dans les festivals car les programmateurs réfléchissent sur la capitalisation de l'image. Quand un directeur artistique fait sa programmation, il préfère se prendre un vent d'un DJ international que de choisir un jeune DJ. Les vrais talents sont ignorés car les directeurs artistiques ne jouent plus leur rôle de défricheur qui permettrait à de nouvelles têtes d'émerger.

Bonus :

- Le top 100 de DJ Mag qui reflète les DJ les mieux payés (attention les yeux).

- Une analyse (aussi critique) du bilan dance 2011 dans Only For DJ's.