Inévitable dans les travées du Mixmove, le pourtant discret président du DMC France se voit comme un "éleveur de champion"...
A la tête de l'organisation de la compétition phare de scratch en France, Wilfrid de Baise ne peut pas faire 5 mètres dans le salon du DJing (11-13 mars 2012 à Paris porte de Versailles) sans saluer des gens ou être interpelé. Président depuis 1989, il a vu défiler des champions qu'il a su amener jusqu'à la victoire mondiale. Sa longévité lui permet aussi d'avoir un avis plus qu'éclairé sur l'évolution de la discipline, dont il parle en toute modestie.
Comment a évolué le DJing en France depuis ton arrivée à la tête du DMC France ?
Il y a eu une montée jusqu'en 1998, année à laquelle nous avons atteint l'apogée avec les championnats du monde organisés au Palais des sports : 8 000 personnes, 4 000 dehors, 15 chaînes de télévision, c'était la folie. Nous sommes restés sur cette vague pendant trois ou quatre ans, tout le monde alors voulait devenir DJ scratcheur.
Le déclin des ventes de platine s'est alors amorcé avec des baisses d'environ 10 % par an avant de se stabiliser à nouveau. Nous sommes aussi passés à d'autres choses que du hip-hop, il y a beaucoup moins de DJ qui jouent du rap maintenant, même si cela reste une discipline hip-hop.
Et en terme de technique ?
L'autre tournant a été la victoire en individuel de Netik au championnat du monde en 2006. Il gagne avec une routine super technique, produite par Le Jad, un producteur de show. C'est la première fois que plusieurs personnes travaillent à la préparation d'un championnat. La technique est alors revenue au-dessus avec beaucoup moins de musicalité. La communauté qui s'intéresse au turntablism s'est réduite car la musique est désormais moins présente.
Quelle différence entre la coupe de France, récemment gagnée par DJ Topic, par rapport au championnat qui est plus connu ?
A la fin des années 1980, la Coupe de Paris était co-organisée par Dee Nasty, je lui ai demandé si on pouvait la reprendre et c'est devenu la coupe de France avec le DMC. Ce principe de battle qui marchait très bien en France a conduit à la création de la battle for world supremacy au DMC monde en 2000.
Avant, il y avait trois catégories : scratch, beat juggling et battle. C'était plus technique que maintenant. Depuis deux ans, faute de participants, le scratch a disparu et nous n'avons gardé que la battle, ce qui est beaucoup plus intéressant.
Il y a eu aussi des éditions ouvertes aux équipes, ce qui permettait à Fly de repartir avec trois trophées sur quatre... Son show lors de sa victoire au championnat du monde en 2008 a été élu récemment meilleur show de l'histoire du DMC (vidéo ci-dessous), alors qu'il y a plus d'Américains qui votent que de Français. Je pense que cette routine est la meilleure de l'histoire du DMC, à la fois accessible et technique.
Comment a évolué la participation aux compétitions en France au fil des années ?
Il y avait avant plus de participations à la coupe, dont certains qui participaient juste pour participer. C'était plus sympa. Selon les années, le nombre de participants par catégorie changeait
beaucoup, une année il y avait 40 prétendants en beat-juggling, la
suivante 40 en scratch. Maintenant, ils participent pour gagner, sinon ils ne viennent pas. Certains s'entraînent pendant six mois, voit la vidéo d'un concurrent sur Internet et laisse tomber. C'est comme ça depuis que la France a des champions du monde.
Sur 30 on en prenait 16 par le passé, mais c'était interminable. Et certains étaient bons sur vidéo, mais rataient tout sur scène. Maintenant on en sélectionne que 4 et on est sûr d'avoir de la qualité.
Et pour le championnat ?
C'est encore pire en terme de participation car ils peuvent n'être que dix. On élimine quand même ceux qui envoient des vidéos qui n'ont rien à voir avec la compétition pour qu'ils ne se ridiculisent pas. L'année dernière [2011], c'était toutefois le plus ouvert depuis longtemps.
Qu'est-ce que les évolutions technologiques ont changé à la compétition ?
Cela ne change pas grand chose, il y a toujours des platines, des cellules et une table de mixage. L'introduction de logiciels type Serato date d'il y a deux ou trois ans par équipe et en battle et de l'an passé en individuel. Cela pourrait demander d'être plus vigilant pour éviter les tricheurs, mais vu la qualité des jurés, cela ne pose pas de problème.
La différence, c'est que les DJ ne se cassent plus le dos à porter les disques. De plus, cela coûte moins cher que d'avoir à presser des disques… c'est donc assez positif. Il y aura toujours des puristes qui diront que c'était mieux avec le vinyles, mais il n'y en a plus beaucoup...
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